La Médiation, l’un des modes de réglement des différends, en remplacement d’une procédure judiciaire (ou en cours de procédure), mérite toute notre attention tant elle peut être efficace et satisfaisante pour les parties qui n’ont ainsi pas le sentiment qu’un tiers (le tribunal) leur impose sa solution, qui n’est que rarement satisfaisante ne serait-ce que pour l’une des parties, et jamais pour les deux.
Mais encore fallait-il ensuite que l’accord trouvé en médiation puisse avoir une valeur réelle et reconnue, si possible sans passer devant les tribunaux.
C’est chose faite : l’accord de médiation rédigé par acte d’avocat constituera un titre exécutoire au sens légal du terme avec toutes les conséquences notamment pour l’efficacité de son exécution.
La Médiation a-t-elle réellement besoin d’une homologation de ses accords et le cas échéant, sous quelle forme pour ne pas rendre cette homologation plus dissuasive qu’attractive ?
Le principe même de la Médiation remonte aux premières civilisations.
Ses prémices se trouvaient déjà dans certains courants philosophiques de la Grèce antique, et le terme même de « Médiation » a été retrouvé sur les tablettes d’argile sumériennes de plus de cinq mille ans.
Aujourd’hui elle est devenue un mode à part entière de règlement des différends, en parallèle des autres MARD, ou encore du procès.
Les intérêts d’une médiation, dans certains types de contentieux, n’est plus à démontrer.
Elle présente l’immense avantage de laisser aux parties (appelées médiés) le choix de leur propre solution plutôt que de confier à un tiers (juge, arbitre ou autre), le soin de décider pour eux.
Solution que les médiés rechercheront et trouveront ensemble, accompagnés et guidés pour ce faire par le médiateur, après qu’il les ait aidés à renouer le dialogue.
Pour autant, encore faut-il s’assurer que l’accord trouvé soit respecté.
A l’issue de la médiation, si les parties tombent d’accord, elles le formalisent ; il s’agit de « l’accord de médiation ».
Il est, la plupart du temps, matérialisé par un écrit.
Cet accord s’impose bien évidemment à ses signataires qui sont tenus de le respecter.
La qualité de sa rédaction est donc primordiale ; à ce stade, l’accompagnement des médiés par leur avocat est donc un véritable atout.
En effet, si son rôle est primordial, le Médiateur ne rédigera cependant pas lui-même cet accord ; son rôle réside dans l’accompagnement des parties tout au long du processus ; il sera là pour permettre aux médiés de renouer le dialogue lorsque c’est nécessaire ; pour les aider à s’entendre et se comprendre, les guidant, se faisant, ainsi vers un accord possible.
Quelle force donner à l’accord de médiation :
Dans un procès le jugement est la solution retenue par le juge et non celle des parties, si bien qu’il est peu probable qu’elles s’exécutent spontanément.
Les décisions de justice sont donc, de façon générale, assorties de la force exécutoire ; chaque partie peut ainsi contraindre l’autre à respecter et exécuter les termes d’un jugement (ou arrêt).
En médiation le process et la situation sont totalement différents.
Qu’elle soit judiciaire (c’est à dire ordonnée par un juge), ou conventionnelle, elle est définie comme : « un processus structuré reposant sur la responsabilité et l’autonomie des participants qui volontairement, avec l’aide d’un tiers neutre, impartial, indépendant et sans pouvoir décisionnel ou consultatif, favorise par des entretiens confidentiels, l’établissement et/ou le rétablissement des liens, la prévention, le règlement des conflits. »
Ainsi, la Médiation se distingue clairement du procès, retenant une approche totalement différente : En médiation les parties (que l’on nomme les médiés) sont maîtres du processus et de la solution qu’ils apporteront à leur différend.
Grâce au processus structuré de cette mesure et avec l’aide et l’assistance du médiateur, ce sont les médiés eux-mêmes qui vont créer, imaginer, la solution à leur différend ; une solution qui emportera ainsi leur pleine approbation puisqu’ils en seront les co-auteurs.
C’est là le propre et la force de la médiation.
Dès lors, l’on peut penser qu’il n’est pas utile que cet accord soit revêtu d’une force obligatoire ou exécutoire comme c’est le cas pour une décision de justice qui leur est imposée sans concertation.
Les accords de médiation ne sont que très rarement non respectés spontanément, contrairement aux décisions de justice.
Néanmoins, dans certains cas, notamment en cas d’enjeux importants, lorsque son exécution s’inscrit dans le temps, ou encore lorsque de nombreuses personnes sont concernées, il peut être utile de donner une sécurité juridique à l’accord de médiation trouvé.
L’accord aura toujours force obligatoire, et s’imposera aux parties ; pour autant, en cas de non-respect, encore faudra-t-il qu’il soit revêtu également de la force exécutoire (ce qui est juridiquement différent) pour que le médié qui le souhaite puisse contraindre son cosignataire à respecter leur accord ainsi formalisé sans recourir à un procès.
Cette force exécutoire de l’accord de médiation peut aussi s’avérer nécessaire pour que les parties acceptent de rentrer en médiation ; en effet, avant que ne débute le process, elles n’ont bien souvent que peut de confiance en l’autre et ont donc besoin de garanties.
I- Homologation de l’accord de médiation.
Jusqu’à la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire, adoptée en décembre 2021, la seule solution pour rendre cet accord exécutoire, au sens légal du terme, était de le soumettre à l’homologation du juge.
La médiation rejoint alors le monde judiciaire.
Cette homologation par un tribunal est toujours facultative. Elle peut se faire, qu’il s’agisse d’une mesure de médiation judiciaire ou conventionnelle.
Si elle présente d’indéniables avantages, (tels ceux ci-dessus rappelés dont la sécurité et la confiance en la mesure), l’homologation de l’accord par le juge peut néanmoins présenter, dans certains cas notamment, quelques inconvénients.
Le premier bémol est le retour devant les tribunaux, alors précisément que la médiation est en principe considérée comme un mode alternatif de résolution du conflit, et se situe donc hors prétoires.
L’homologation peut également, et plus concrètement, poser un problème de confidentialité.
Confidentialité qui est un des principaux piliers de la médiation.
L’accord de médiation, tout comme les échanges durant tout le process, sont par principe soumis à une stricte confidentialité (sauf accord express des parties).
Or, l’homologation suppose que l’on communique au juge le contenu de l’accord trouvé, qui ne sera ainsi plus tout à fait confidentiel.
Sa diffusion est ainsi certes limitée, auprès de professionnels de confiance, pour autant, les médiés peuvent conserver à l’esprit la crainte que ce même magistrat garde, même malgré lui, cet accord à l’esprit dans d’autres procès de nature similaire, voir concernant l’un, ou les, signataire(s).
II- Autres pistes envisagées.
Dans le projet de loi Dupond-Moretti, de mars 2021, le Garde des sceaux envisageait de remplacer l’homologation des accords de médiation par le juge, par un simple visa du greffe leur donnant force exécutoire, sans passer par un juge.
Il ne s’agirait plus d’une homologation, mais d’une simple délivrance de formule exécutoire.
L’autre voie qui a été envisagée, ou à tout le moins proposée, est de donner à l’accord de médiation, la forme d’un acte d’avocat, lorsqu’il est rédigé et contresigné par les conseils des médiés.
La Loi française n°2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées a créé l’acte d’avocat (ou l’acte contresigné par Avocat).
Il s’agit d’un acte, rédigé et signé par les Avocats aux côtés de leurs clients, dont les termes font foi, rendant sa remise en cause bien plus compliquée que pour un simple contrat conclu entre les parties.
L’accord de médiation peut, aujourd’hui déjà, parfaitement être formalisé par un acte d’avocat.
Pour autant, jusqu’alors, cet acte ne disposait pas de la valeur d’un titre exécutoire.
Dès l’entrée en vigueur de la loi pour la confiance en l’institution judiciaire de décembre 2021, tout accord de médiation rédigé par acte contresigné d’avocat pourra être revêtu de la formule exécutoire par le greffe et valoir ainsi titre exécutoire, au même titre d’un jugement ou un acte notarié.
L’accord de médiation, ou conciliation (notamment), rédigé par acte d’avocat est ajouté à la liste des titres exécutoires de l’article L111-3 du CPCE.
Aujourd’hui donc, dès que la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire entrera en vigueur, les parties auront le choix entre :
Soit de ne pas faire homologuer l’accord trouvé, qui, dans les faits, a toutes les chances d’être respecté et parfaitement exécuté sans difficulté,
Soit, lorsque les circonstances le nécessitent, d’en demander l’homologation au juge compétent pour ce faire ; l’accord revêtira ainsi la même valeur qu’une décision de justice a priori.
Soit donner force exécutoire à leur accord de médiation dès lors qu’il sera rédigé par acte d’avocat (et donc par avocats des parties)
Les parties, sur ce point encore, conservent toute latitude, et une entière liberté.